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Comment a été le millésime 2019 à Bordeaux
L’année 2019, malgré la pandémie et le contexte sanitaire difficile, a complété une série de millésimes bordelais très réussis (mais pas sans difficultés pour les vignerons). Rappellons conditions d’un millesime exceptionnel, dont beaucoup le millésime 2019 a réuni:
- Un temps chaud et sec pendant la période de floraison et de nouaison pour une formation régulière des fleurs et une pollinisation réussie. Si le temps est pluvieux et nuageux, il y aura un risque d’une mauvaise formation des inflorescences et la pollinisation sera difficile. Par conséquent, le volume de la récolte sera plus faible et la période de maturation des raisins sera raccourcie car les baies commenceront à se former plus tard et plus lentement.
- Un léger stress hydrique en juillet avant le début de la maturation des baies, car il va stopper la croissance de la vigne qui, dans ces conditions, va se concentrer sur la maturation des fruits plutôt que sur l’aumentation de son feuillage.
- Un temps ensoleillé et des précipitations modérées, qui assureront une bonne maturation uniforme des baies – l’excès d’eau remplira les baies et diluera le bouquet du futur vin, tandis que un stress hydrique important arrêtera la photosynthèse et, par conséquent, la maturation et l’accumulation de sucre dans les baies.
- Un temps ensoleillé et chaud avant les vendanges, avec peu de précipitations et des nuits fraîches, ce qui permettra aux raisins d’atteindre une maturité optimale, sans risque de pourriture grise et de dilution du bouquet (par temps pluvieux) ou de baisse de l’acidité (si la différence entre les températures diurnes et nocturnes est faible).
En 2019, la première condition n’a été que partiellement remplie.
Les trois premiers mois ont été marqués par un temps hivernal très chaud et doux, la plupart des précipitations étant tombées en janvier, le seul mois d’hiver au cours duquel les températures moyennes n’ont pas dépassé la norme. En revanche, le mois de mars s’est distingué par un ensoleillement généreux et une pluviométrie nettement inférieure (-70% de la norme mensuelle).
En raison de l’hiver chaud et du début ensoleillé du printemps, le débourrement a commencé une semaine plus tôt que d’habitude (mi-mars), mais le temps frais et les précipitations ont ralenti la croissance des vignes.
Le début du mois de juin, période de floraison, a également été marqué par des conditions fraîches et humides ! Par conséquent, la floraison n’a pas étée uniforme dans toute l’appellation Bordeaux. Certains vignobles ont rencontré les problèmes de chute des fleurs ou une pollinisation erratique, qui ont ensuite entraîné une formation et maturation irrégulière des baies (millerandage) ou une chute des baies au sein de la grappe (coulure).
Une période de chaleur et de sécheresse estivale a débuté à la mi-juin, mais les réserves d’eau accumulées dans le sol au printemps ont permis à la vigne de poursuivre sa croissance dans des bonnes conditions pour le début de la formation des fruits.
Le mois de juillet 2019 a été généralement sec et chaud, avec des orages et des averses courtes mais abondantes, inégalement réparties dans la région. Ceci, ainsi que les différences dans la composition du sol, a provoqué un arrêt irrégulier de la croissance de la vigne, souvent après le moment optimal. Le début de la maturation des raisins (même d’une même variété) n’a donc pas été simultané pour toute la région de Bordeaux. Les sols avec un bon drainage ont pu générer un stress hydrique suffisant et un début de maturation optimal. En revanche, sur des sols moins drainants, les vignes ont poursuivi leur croissance, qui s’est arrêtée plus tard, retardant ainsi le début de la maturation.
Le temps en août a alterné entre des périodes chaudes et fraîches, ce qui a contribué à un processus de maturation optimal.
La première quinzaine de septembre a été sèche et chaude, en provoquant un stress hydrique. Ainsi, le retard de maturation dans certaines parties de Bordeaux a été compensé grâce au le début de septembre chaud, et les cépages rouges ont pu progressivementaméliorer leur couleur, leurs arômes et adoucir leurs tanins. En revanche, l’augmentation des précipitations vers la fin du mois a permis d’éviter un stress hydrique excessif et la maturation des baies pour les variétés à maturation tardive, qui poussent sur des sols drainants.
Ces conditions ont contribué à la lente maturation des baies, autre caractéristique d’un millésime réussi.
Les précipitations optimales sont tombées au cours de la dernière décade de septembre, achevant le processus de maturation sans le risque élevé de pourriture grise.
Ainsi, le cépage Merlot a achevé sa maturation à la fin du mois de septembre et le Cabernet aussi a été récolté en excellent état. En 2019, comme en 2018, les deux dernières conditions ont été remplies, ce qui a donné lieu à une récolte de raisins rouges d’excellente qualité.
Les vendanges des cépages blancs ont terminées le 23 septembre, avant les pluies qui sont tombées à la fin du mois. Malgré un été chaud, normalement incompatible avec une grand millésime pour les vins blancs, les vignes ds cépages blancsn’ont pas souffert de stress hydrique excessif. Les raisins ont donc été récoltés en excellent état, avec une teneur en sucre suffisante, une excellente acidité et de merveilleux arômes, essentiels pour des vins équilibrés avec un bon potentiel de garde.
Vins liquoreux de Sauternes
Quant aux vins liquoreux de Sauternes, résultant du « travail » de la pourriture noble Botrytis Cinerea sur les raisins, son émergence a été retardée par un temps chaud et sec (qui, en revanche, est favorable à la maturation des cépages rouges). Par endroits, la pourriture grise est apparue dans le vignoble, obligeant les vignerons de nettoyer les rangs des vignes pour éviter qu’elle ne se propage dans tout le vignoble. Les pluies de la fin septembre ont « déclenché » la propagation de la pourriture noble sur les baies parfaitement mûres . Ainsi lors du développement de la pourriture noble, la concentration de sucre et d’arômes dans les baies augmentait assez rapidement. La majeure partie de la récolte a été vendangée avant la mi-octobre, grâce aux efforts des vignerons et aux tris des raisins trs séléctif. En conséquence, le Millesime 2019 pour les vins liquoreux n’était pas le plus généreux, mais d’une très grande qualité – avec des arômes purs et une bonne concentration.
L’effet du millésime en fonction du cépage
Merlot – les raisins ont été récoltés un peu plus tôt que d’habitude, mais pas aussi précocement qu’en 2018. Pour une bonne maturation du Merlot, la fin août et le début septembre sont cruciaux, la période habituelle de récolte se situant dans la seconde moitié de septembre. En 2019, les caractéristiques des vins basés sur Merlot dépendaient de la période des vendanges choisie – avant ou après les pluies de la troisième semaine de septembre. Ainsi, la teneur globale en sucre des baies de merlot était assez élevée, encore plus élevée qu’en 2018, mais en même temps – avec un niveau d’acidité plus élevé aussi. La pellicule des baies de Merlot, assez épaisse en 2019, était riche en anthocyanes, qui ont donné aux vins une couleur profonde. En revanche, en raison de périodes de pluie en août et septembre, les pépins n’ont pas atteint le niveau de maturité de 2018. Dans l’ensemble, pour le Merlot 2019, les conditions de temps sec et doux pendant la maturation et la récolte ont été satisfaites, ce qui a donné sa récolte réussie et qualitative.
Cabernet Sauvignon et Cabernet Franc – les vendanges ont commencé immédiatement après Merlot et les pluies fin septembre. La plupart des vendanges a eu lieu au cours de la première décennie d’octobre, dans des conditions idéales – des températures diurnes autour de 20°C, un ensoleillement généreux, de rares précipitations et un temps venteux permettant aux baies de sécher en quelques heures après la pluie. Par rapport à 2018, les baies de cabernet étaient plus petites, mais avec des niveaux comparables de teneur en sucre, une acidité plus élevée, une couleur plus riche et des niveaux plus élevés de tanins. Les pépins ont atteint leur maturité juste avant la récolte. Ainsi, grâce aux pluies de septembre, le Cabernet Sauvignon a continué à mûrir et les conditions d’un bon millésime pour ce cépage ont également été réunies. Les Cabernets présentaient également une belle arômatique, bien que le bouquet de fruits n’apparaisse pas immédiatement, en raison des différences de maturité en fonction du site.
Caractéristiques des vins de 2019
Blancs secs – très réussis, avec des notes caractéristiques de Sauvignon Blanc mûr (pamplemousse, citron), des notes exotiques et la rondeur du Sémillon mûr et, en même temps, étonnamment frais.
Blancs liquoreux – pures et aromatiques, assez sucrés mais pas lourds, avec un finale fraîche et une vive acidité, grâce au tri sévère dû aux conditions climatiques défavorables de 2019.
Rouges – les vins sont hétérogènes, plus ou moins réussis en fonction de l’appellation au sein de la région. Il n’est pas évident de décrire le millésime 2019 du Bordeaux rouge en un mot. La récolte de Merlot a été bonne, avec des arômes éclatants de cerise, de prune mûre et de mûre, une texture ronde et des tanins veloutés. Cette maturité technique et phénolique a pu être atteinte grâce aux pluies de la fin septembre. La teneur en sucre et le taux d’alcool étaient élevés, confirmant la tendance générale à l’augmentation de la teneur en sucre dans le raisin au cours des dernières années. Mais en général les vins sont équilibrés, grâce à l’acidité élevée des baies, ce qui rapproche le millésime 2019 du Bordeaux classique.
Les cabernets, toujours grâce à des pluies modérées et une fin de saison assez chaude, ont été récoltés à maturité optimale et dans un excellent état sanitaire. Globalement, ils n’atteignent pas le niveau de richesse des millésimes exceptionnels, mais présentent un bouquet vif et fruité et une structure tannique forte. Les meilleurs résultats ont été obtenus sur les sols les plus appropriés pour le Cabernet avec une couche profonde de gravier.
Dans le prochaine article je partagerai mes impressions et mes notes des dégustation des vins de l’Union des Grands Crus de Bordeaux, qui illustrent parfaitement les